Local Pop-up versus syndic:qui a encore son mot à dire?

Pour l’entrepreneur (débutant), louer un local commercial n’est de nos jours possible qu’en concluant un bail commercial. Cela a pour conséquence immédiate d’engager les parties pour un certain nombre d’années (durée de base d’au moins 9 ans). En outre, cela apporte au propriétaire la certitude d’un revenu locatif suffisant ; à l’entrepreneur de rentabiliser ses investissements.

Par contre, pour l’entrepreneur qui envisage un emplacement commercial Pop-up, cette protection juridique peut constituer un obstacle. Les magasins pop-up sont de plus en plus courants et ils apportent une réponse aux nouvelles exigences d’un marché en pleine évolution. C’est pourquoi le gouvernement a créé un cadre juridique soumis à des règles spécifiques. La durée du contrat ne peut excéder un an et la résiliation est aisée pour le locataire. Par ailleurs le contrat permet au locataire d’effectuer des travaux dans le local, lorsque le locataire en fait la demande par écrit au propriétaire, qui à son tour est en droit de lui demander la remise en état du local dans son état d’origine.

Le bailleur peut bien entendu posséder un local (commercial) faisant partie d’une copropriété, de sorte qu’il devra à son tour se conformer aux règles édictées par la loi sur la copropriété, mais aussi l’acte de base, les statuts, les règles de copropriété et le règlement d’ordre intérieur.

La question qui se pose régulièrement est celle de savoir comment un gestionnaire d’immeuble doit aborder et gérer cette situation. De quelle manière pourra t’il éviter que le locataire qui emménagera dans le local commercial pour une courte période ne soit à l’origine de trop grands conflits avec les autres copropriétaires qui, dans de la plupart des cas ne sont pas des commerçants mais des résidents paisibles qui souhaitent vivre tranquillement dans leur résidence.​

Cette nouvelle tendance dans les immeubles à appartements, qui consiste à mettre à disposition des locaux de rez-de-chaussée (en général) pour y installer des magasins pop-up, a entre autre pour avantage, de louer un local vide à faible coût et pour une courte période. Dans le contexte de la copropriété, la question principale est bien entendu de savoir si cet usage du rez-de-chaussée d’un immeuble d’habitation est compatible avec le standing de l’immeuble.

A ce sujet il est important que soit le règlement de copropriété, soit une décision de l’assemblée générale, prévoient une réglementation adéquate, comme c’était le cas autrefois. Dans la plupart des immeubles, la location à des fins commerciales, la restauration ou autres activités étaient réglementée par les statuts ou le règlement d’ordre intérieur. La destination des locaux pouvait être limitée et restreinte.

Pour le syndic, il est donc essentiel d’initier systématiquement les modifications nécessaires à l’acte de base et au règlement d’ordre intérieur, modifications grâce auxquelles les clarifications utiles seront introduites quant à la nature des commerces qui seront autorisés dans les ACP en question.

Il nous semble difficilement compatible, d’autoriser d’une part un copropriétaire à louer un local via un bail commercial classique de 9 ans (qui peut être résilié par le locataire après 3 ans), et de lui défendre d’autre part de louer ce même local à un magasin pop-up, alors que c’est le type de commerce et la destination des lieux qui doivent être clairement définis dans l’acte de base et le règlement d’ordre intérieur.

En pratique, le problème se pose, évidemment, lorsqu’un locataire qui loue pour une courte durée ne respecte pas les règles fixées au sein de l’immeuble. Le gestionnaire d’immeuble n’est pas toujours en mesure de réagir rapidement. Naturellement, il exhortera en premier lieu le copropriétaire/bailleur à mettre fin à court terme à une utilisation interdite du local en question. Mais s’il n’obtient pas de réponse à sa demande, le syndic devra demander à l’assemblée générale un mandat pour pouvoir intenter une action en justice.

Le plus simple serait que le règlement d’ordre intérieur prévoit pour le syndic un mandat permanent lui permettant d’intervenir en cas de baux non autorisés. A défaut, si cela n’a pas été prévu, le gestionnaire immobilier pourra se prévaloir de son obligation générale de faire respecter les règles de copropriété et d’ordre intérieur.

Mais une autre solution existe, dans le cas où d’autres copropriétaires ou parties communes menacent de subir des dommages graves du fait d’une exploitation non autorisée. En effet, le syndic est habilité, en application de l’article 577-9, § 1, troisième alinéa du Code civil, à introduire « toute demande urgente ou conservatoire en ce qui concerne les parties communes, à charge d’en obtenir ratification par l’assemblée générale dans les plus brefs délais ». Par conséquent, le syndic a la possibilité, lorsque par exemple des locataires stockent dans leurs locaux certaines marchandises en violation du règlement d’ordre intérieur, d’intenter une action autonome contre ces locataires. (Justice de Paix Etterbeek 17 juin 2011, et Justice de Paix 2013, 76)

En ce qui concerne le copropriétaire négligent, qui ne répond pas au syndic, ce dernier peut être dans un premier temps traduit devant le juge du fonds en réclamation d’une restauration à l’état antérieur, éventuellement accompagnée de la démolition de structures érigées illégalement. Et si dans le contexte du magasin pop-up, la destination statutaire de la partie privative n’a pas été respectée, un ordre de cessation d’activité peut être requis ; comme par exemple, la cessation de l’exploitation d’une entreprise qui serait contraire à la destination conventionnelle non commerciale des locaux prévue dans l’acte de base. (Vred. Antwerp (V) 19 février 1986, T.Not.1986, 248).

Enfin, il est important de noter que ces règles ne s’appliquent pas seulement aux copropriétaires, mais aussi plus largement, aux locataires et aux utilisateurs. Comme le prévoit l’art. 577-10 CC. les dispositions du règlement d’ordre intérieur les concernent également.

Il est donc utile de renforcer la position de l’ACP le plus possible en intensifiant par exemple les dispositions du règlement d’ordre intérieur. Mais en tout état de cause, le syndic pourra toujours, dans le cadre de ses pouvoirs (légaux), agir en justice pour défendre les droits de la copropriété.

INFO

Mr Philip LEPERE avocat
CGK Advocaten
Paleisstraat 24, 2018 Antwerpen
T 03 286 76 60
W www.cgkadvocaten.be

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