Le privilège de l'association des copropriétaires

1. Mise en oeuvre du privilège

En 2018 notre législateur a apporté plusieurs modifications aux règles de la copropriété.
La loi hypothécaire a notamment été modifiée, par l'ajout du texte suivant à l’article 27.7° :​

« Les créanciers privilégiés sur les immeubles sont : « L'association des copropriétaires sur le lot dans un immeuble ou groupe d'immeubles bâtis pour les charges dues relativement à ce lot. Ce privilège est limité aux charges de l'exercice en cours et de l'exercice précédent. Il prend rang après le privilège des frais de justice prévu à l'article 17, le privilège visé à l'article 114 de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances et les privilèges inscrits antérieurement »

Par ailleurs et en lien direct, l'article 29 de la loi sur les hypothèques a été modifié d'où il découle qu'il concerne un privilège silencieux ou occulte (voir infra).​

La principale raison de l'introduction du privilège est l'importance croissante de la vie en appartement. Par exemple, aujourd'hui, une partie importante de la population flamande vit en appartement. Cette forme de d’habitation collective implique essentiellement une forme de cohabitation forcée, puisque rien ne permet, dans la réalité, aux habitants de choisir avec qui elles vivent dans un immeuble à appartements. La gestion de la copropriété a également des implications financières (parfois importantes) pour les copropriétaires. Le défaut de paiement d'un copropriétaire qui ne respecte pas ses obligations financières a des conséquences indéniables pour les autres copropriétaires. C’est donc en réponse expresse à ce problème, que le privilège a été explicitement été introduit.

2. Le privilège disséqué

Le privilège peut être analysé à partir de 5 questions qui seront traitées ci-après dans le même ordre :

  1. à quelle créance s’applique le privilège ?,
  2. qui est le titulaire du privilège ?​
  3. quel lot est concerné ?
  4. quelles sont les conséquences de l'absence de publicité ?
  5. quel rang s’applique au privilège ?

1. Le privilège s'applique aux contributions liées à un lot spécifique et est limité aux apports de l'exercice en cours et de l'exercice précédent. On entend par contributions, les dettes auxquelles chaque copropriétaire est tenu en sa qualité de copropriétaire. Il ne s'agit pas seulement des contributions normales au fonds de roulement, mais aussi des charges exceptionnelles avec appels de fonds de réserve.

Quant à la limitation dans le temps, elle concerne bien l'exercice en cours et l'exercice qui le précède. Il est à noter qu'un exercice comptable peut être prolongé suite à une décision de l'assemblée générale des copropriétaires.

2. C'est l'association des copropriétaires qui détient le privilège. Il est essentiel d'avoir la personnalité juridique pour pouvoir invoquer le privilège. Concrètement, si l'association n'a pas la personnalité juridique, elle ne pourra pas invoquer le privilège.

3. La garantie du privilège est constituée par le lot d'un immeuble ou d'un ensemble d'immeubles. Il s'agit donc des parts privatives ainsi que de la part des parties communes du lot concerné. Dans la mesure où des travaux ont été réalisés dans le lot privatif, pouvant être considéré comme immeuble par destination, ces travaux seront considérés comme appartenant au lot et donc faisant partie de la garantie représentée par la lot.

4. La plus grande source de controverse est peut-être le fait qu'il s'agit d'un privilège silencieux ou « occulte ». Aucun transfert ou inscription n'est donc requis. La motivation et, en même temps, la faiblesse du privilège « occulte » réside dans le fait que d’une part, l’enregistrement d'un privilège repose sur la déclaration précise des arriérés , alors que par ailleurs, dans le cadre de la gestion de la copropriété, les demandes d’acomptes du syndic sont périodiques, ce qui rend difficile la fixation d’un montant qui peut encore augmenter après l'enregistrement.

5. En termes de rang, en cas de cumul, le privilège primera sur les privilèges généraux et les hypothèques. Il y a cependant un problème d’ordre temporel par rapport aux « privilèges précédemment enregistrés » , puisqu’on ne sait pas clairement comment ils s’articulent dans le temps. Le manque de clarté dans ce domaine risque d’occasionner bien des discussions.​

3. Evaluation

Le principal argument en faveur de l’introduction du privilège de l’ACP est, comme mentionné précédemment, l'importance croissante de la cohabitation en copropriété forcée.
L’interdépendance réciproque des copropriétaires, qui n'ont pas forcément choisi de s'engager dans cette relation mutuelle, mais y sont contraints par la copropriété forcée, a conduit à vouloir limiter les risques d'insolvabilité.

Quant aux arguments contre le privilège, ils concernent le plus souvent l'impact éventuel sur le crédit hypothécaire et l'insécurité juridique qui en découle. En raison de l’absence de publicité d'une part et parce que les montants peuvent continuellement évoluer d'autre part, il n'est pas exclu que les établissements de crédit deviennent plus prudents dans l'octroi de crédits immobiliers (ou qu'ils deviennent plus chers). Du fait que le créancier hypothécaire passera après le privilège de l’ACP, les mauvaises surprises ne sont pas à exclure. Les banques pourraient donc être enclines à intervenir plus rapidement si les versements du crédit immobilier n

Mr Benoit Stockman
Directeur BE-LE-RE Consulting BV
benoit.stockman@outlook.com

Conseil de l'Union des Syndics (UDS)

​En application de l’article 3.94 NCc, le syndic a officiellement communiqué au notaire les charges et frais dus par le vendeur.


Attention, la loi ne parle pas des accessoires de la créance (pénalités, frais de recouvrement). Il faut donc les inclure également.


Si, lors de l’acte authentique, le vendeur conteste ces arriérés ou frais, le notaire retient les arriérés et en avise le syndic par envoi recommandé dans les trois jours ouvrables qui suivent la passation de l’acte authentique.


Dans les vingt jours ouvrables qui suivent la date du courrier recommandé du notaire, le syndic doit effectuer une saisiearrêt conservatoire ou exécutoire par l’intermédiaire d’un huissier de justice. A défaut de saisie-arrêt en bonne et due forme, le notaire peut valablement verser le montant des arriérés au copropriétaire vendeur.


Parfois la totalité des dettes dues par le vendeur à la copropriété ne pourront être récupérées dans le cadre de cette procédure. Pour tenter de récupérer le solde impayé il sera parfois nécessaire d’introduire une procédure contre le copropriétaire vendeur devant le juge de paix.


Si le syndic utilise la méthode de la provision unique (« fonds de garantie » approuvée par l'AG), il pourra éventuellement récupérer la majorité des arriérés, voir la totalité du montant dû.

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