Transférer sans faille un dossier à un syndic nouvellement désigné... c’est possible !

Sous-estimée et difficile, la tâche d’un syndic est et reste, selon les règles du code civil, la gestion mandatée des biens d’autrui, ce qui signifie que chaque copropriétaire doit pouvoir s’y fier.

Il conviendrait donc que chaque copropriétaire accorde positivement au syndic confiance et respect jusqu’au dernier jour de son mandat, y compris durant la période de 30 jours suivant la
fin de son mandat.​

Souvent, le bât blesse lorsque le mandat d’un syndic se termine et qu’il est supposé remettre, en temps voulu et intégralement, le dossier de gestion de l’immeuble à son successeur.​

La déception d’un syndic dont le mandat a été résilié, un manque d’affinités entre le syndic et son successeur et d’autres causes possibles donnent généralement lieu à des discussions (non profitables à la copropriété) à l’occasion du transfert du dossier degestion de l’immeuble.​

L’article 577-8 § 4, 9° du Code civil établit ce qui suit : « Quels que soient les pouvoirs qui lui sont conférés par le règlement de copropriété, le syndic est chargé de transmettre, si son mandat a pris fin de quelque manière que ce soit, dans un délai de trente jours suivant la fin de son mandat, l’ensemble du dossier de la gestion de l’immeuble à son successeur ou, en l’absence de ce dernier, au président de la dernière assemblée générale, y compris la comptabilité et les actifs dont il avait la gestion, tout sinistre, un historique du compte sur lequel les sinistres ont été réglés, ainsi que les documents prouvant l’affectation qui a été donnée à toute somme qui ne se retrouve pas sur les comptes financiers de la copropriété. »

Le code de déontologie, approuvé par l’arrêté royal du 29/06/2018 et publié au Moniteur belge le 31/10/2018, stipule, en ce qui concerne les obligations particulières des agents immobilierssyndics en vertu de l’article 85, que dans le cadre de la transmission entre agents immobiliers-syndics, le syndic démissionnaire et son successeur établissent un inventaire détaillé des documents transmis. Malgré la portée de ces articles, on constate dans la pratique l’existence de différends entre le syndic sortant et son successeur, voire de plaintes concernant des manquements présumés à des obligations déontologiques. Toutefois, on pourrait (plus) facilement éviter ces exemples négatifs si chacune des parties concernées connaissait les règles auxquelles doivent se soumettre le syndic sortant et le syndic entrant.

Toute succession d’un syndic par un autre syndic et tous les contacts pratiques entre eux doivent faire l’objet d’un respect mutuel élémentaire, ce qui est par ailleurs inscrit dans les règles déontologiques générales qui garantissent (ou aident à garantir) l’honneur, la dignité et la bonne réputation des agents immobilierssyndics. En outre, tout syndic est tenu par les principes du droit commun et, en particulier, les principes de bonne foi et de loyauté. En résumé, le respect professionnel mutuel, dans l’intérêt de chaque copropriétaire de l’immeuble dont le dossier de gestion est transféré, est indispensable.

En règle générale, il va de soi que le dossier de gestion de l’immeuble doit être transféré à temps et dans son intégralité, même en cas de contestations relatives aux frais ou honoraires, lesquelles ne peuvent, par ailleurs, nullement servir d’excuse pour renoncer à cette double obligation. Le dossier doit être remis par le syndic sortant dans un délai de 30 jours suivant la fin de son mandat : la loi est claire à ce sujet et ne permet aucune interprétation.

En outre, il peut être attendu du syndic sortant qu’il prenne les mesures nécessaires, avec une certaine diligence, pour transférer le dossier en temps opportun en vue d’assurer la continuité de la gestion de la copropriété. Afin de garantir le respect des délais, il est recommandé qu’à la suite du premier contact entre le syndic sortant et son successeur, ils conviennent immédiatement d’une date concrète pour le transfert du dossier, qu’ils s’engagent à respecter sauf en cas de force majeure, sous réserve bien sûr que le syndic entrant fasse preuve d’un mandat clair et valable.

Le transfert du dossier doit de préférence se faire de la main à la main entre le syndic sortant et le syndic entrant, sans l’intervention d’un quelconque intermédiaire (dans la pratique, c’est généralement un huissier de justice, un service de courtage, un membre de la copropriété) dont le manque de disponibilité explique parfois pourquoi un transfert n’a pas lieu à l’issue du délai de 30 jours.

Dans la pratique, il s’avère que la plupart des discussions et litiges concernent l’exhaustivité du dossier à transférer. Cela est souvent dû à deux raisons : d’une part, le syndic sortant et le syndic entrant ne s’accordent pas, a priori, sur ce qu’il faut entendre par un dossier complet et, d’autre part, l’exhaustivité du dossier est contestée a posteriori , donc pendant ou après le transfert.

1.

Un dossier complet suppose que le syndic sortant ait remis tous les documents relatifs à la gestion de l’immeuble, y compris le mandat écrit initial avec mention des honoraires, les preuves de convocation aux assemblées générales précédentes et les procèsverbaux de celles-ci, avec les listes de présence et les formulaires de procuration, les paiements effectués par copropriétaire, les statuts, le règlement d’ordre intérieur, les accords avec les fournisseurs, les rapports relatifs, par exemple, à l’inspection des ascenseurs, les documents pertinents relatifs, par exemple, aux réceptions de travaux effectués dans les parties communes, tout éventuel dossier judiciaire, l’administration sortante et entrante (p. ex. de/ vers un notaire en cas de vente d’un appartement), la comptabilité et les comptes bancaires.

Il est vrai que, dans une certaine mesure, le texte de fond de l’article 577-8 § 4, 9° du Code civil donne lieu à des interprétations divergentes : que faut-il entendre exactement, par exemple, par la notion de « comptabilité » ? La « comptabilité » est en effet une notion large qui doit être réduite à sa juste valeur : contrairement à ce qu’il ressort de discussions récurrentes, le syndic sortant n’est pas tenu, par la loi ou par coutume, de fournir un bilan intermédiaire lors du transfert d’un dossier.

Il est essentiel de fournir un aperçu chronologique de la situation financière de la copropriété, avec les résultats annuels des revenus, coûts et dépenses enregistrés, y compris les réserves accumulées, permettant le suivi et la vérification transparente des décisions financières, indépendamment de toute décharge éventuelle que le syndic sortant aurait pu recevoir au cours de son mandat.

Par ailleurs, il arrive encore souvent que, dans le cadre des « comptes bancaires » à transférer, le syndic entrant demande, à tort, au syndic sortant les relevés bancaires papier, vu que les relevés bancaires électroniques sont disponibles et que le syndic entrant, moyennant un minimum d’efforts de sa part et s’il le juge nécessaire pour la bonne exécution de son mandat, peut obtenir lui-même des relevés bancaires sur papier via la plateforme en ligne dont dispose actuellement chaque banque.

2.

Lors du transfert ou à la suite de celui-ci, il arrive que des discussions aient lieu à propos de l’exhaustivité du dossier. La diligence et un souci de transparence permettent toutefois de les éviter.

En effet, il est recommandé qu’un syndic, dès le début de son mandat, dresse un inventaire soigné, si nécessaire contradictoire, des documents ou actifs qu’il reçoit dans le cadre de la gestion de l’immeuble.

Parmi les problèmes récurrents dans ce contexte, citons les discussions à propos du transfert des clés permettant d’accéder aux parties communes lorsque le syndic entrant, que ce soit ou non à la demande de l’association des copropriétaires de l’immeuble, déclare que la quantité de clés transférée n’est pas correcte.

Si, après la réception initiale des clés, le syndic sortant n’a pas noté et procédé à une confirmation contradictoire du nombre de clés reçues, un problème de preuve se pose pour lui avec, malheureusement, tous les inconvénients qui peuvent s’ensuivre.

En d’autres termes, il est essentiel pour tout syndic de répertorier correctement, et de préférence de manière contradictoire, tous les actifs mis à sa disposition ou collectés pendant la durée de son mandat. Sous réserve d’une bonne administration, cela permettra en effet de faciliter un transfert transparent et d’éviter toute discussion.

Il est également particulièrement recommandé que le syndic sortant, en consultation avec le syndic entrant, prévoie un délai suffisant au moment du transfert pour examiner ensemble le contenu du dossier de gestion de l’immeuble afin que le syndic entrant puisse signer un accusé de réception écrit en toute connaissance de cause, comprenant l’approbation immédiate de l’ensemble du contenu requis par la loi.

INFO

Kris Maes
Senior Partner Association d’avocats Nelissen Grade
Louvain – Bruxelles - Waasmunster
kris.maes@nelissengrade.com


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