Profession de syndic sous-payée et donc peu attractive

Chaque syndic le sait maintenant, il n'y a pas de barème fixe, obligatoire ou recommandé pour la gestion d'immeubles d'appartements. Aujourd'hui, les syndics sont totalement libres de fixer leurs tarifs. Les tarifs obligatoires ou imposés sont même interdits. Ce n'est pas seulement le cas des syndics, mais aussi des agents immobiliers, des avocats, des architectes, etc.

L'imposition de tarifs est contraire au droit européen de la concurrence​

Le 09 février 2004, la Commission européenne a publié un rapport sur la concurrence dans les services professionnels. Ce rapport indiquait que l'établissement de barèmes recommandés constituait une infraction au droit de la concurrence. Le 24 juin 2004, l'Association des architectes a été condamnée à une amende de 100 000 EUR par la Commission européenne pour ses barèmes considérés comme une violation de l'article 81, paragraphe 1, du traité européen.

Certains syndics utilisent encore les barèmes autrefois « recommandés »​

L'Institut Professionnel des Agents Immobiliers (IPI), qui imposait depuis des années des «tarifs recommandés» aux syndics, s'est depuis longtemps distancié des barèmes en question. Pourtant, certains syndics professionnels les utilisent encore même s’ils ont à peine augmenté depuis 1996! On en est resté à un tarif d'environ 15 euros par appartement pour un immeuble de taille moyenne.

Des taux à peine augmentés depuis 1996

Il est regrettable de constater qu’environ 25 ans plus tard (!), la plupart des syndics travaillent toujours sur des tarifs qui s'écartent à peine des tarifs de 1996! En comparaison aux honoraires d’autres professions, on ne peut que constater une triste réalité: le gestionnaire immobilier est devenu le parent pauvre du secteur immobilier.

En 2021, nous trouvons encore des syndics professionnels qui, dans certaines régions, facturent encore une moyenne de 12 à 15 euros par mois par appartement. Dans les grandes villes, cela varie entre 17 et 20 euros par mois. En 2018, avec le soutien de notre fédération, une minorité de syndics a mis en place une revalorisation des honoraires de gestion à 22 euros par appartement par mois.

Augmentation impressionnante des prix à long terme sur le marché immobilier belge​

Dans son rapport sur la stabilité du système financier, la Banque Nationale dresse la liste des évolutions du marché immobilier belge. L'augmentation des prix à long terme est tout simplement impressionnante. Par exemple, les prix de l'immobilier résidentiel ont plus que doublé depuis le début des années 2000! Bonne nouvelle pour les professions comme les agents immobiliers et les architectes qui travaillent généralement en pourcentage sur le prix de vente d'une maison / appartement ou les coûts de construction d'un projet.

Méthode de calcul des honoraires toujours inchangée

Non seulement les frais par appartement changent à peine, mais la méthode de calcul est toujours basée sur le nombre d'appartements (voir mon article à ce sujet dans la 4e édition de Property Today). Personne n'ose innover et utiliser une nouvelle méthode de calcul, même si celle actuellement utilisée s'est avérée archaïque et certainement pas représentative des parties communes. Pensez simplement aux éléments variables comme le nombre de hall d'entrées, à l'état de la toiture ou de l'ascenseur, au nombre de procédures juridiques en cours, à la vétusté ou aux autres aspects qui n'affecteront finalement pas le tarif de base proposé sur base du nombre d’appartements.

Créativité pour rendre notre métier plus attractif

Un peu de créativité profiterait à notre profession et la rendrait plus attractive. Pourquoi ne pas proposer des honoraires procentuels, comme le font par exemple, les agents immobiliers et les architectes? Une redevance (pour les immeubles plus importants) basée, par exemple, sur le budget annuel? Ou sur la valeur assurée du bâtiment?

Arrêter l’hémorragie…

Le fait que le métier ne soit plus attractif pour la jeune génération n’est plus un scoop. Près de neuf stagiaires sur dix souhaitent uniquement travailler comme courtiers dans le cadre d’une vente ou d’une location d'immeuble. Sur plus de 2.000 stagiaires, moins de 100 souhaitent devenir administrateur de biens à plein temps. «Le reflux des syndics est supérieur à l'afflux», nous dit-on à l’IPI.

Profession en pénurie

De moins en moins de diplômés se sentent donc appelés à devenir syndic d’immeuble. Et cela alors que les immeubles à appartements continuent à sortir de terre comme des champignons …. Quelles sont les raisons d’une telle débâcle?

  • La législation de plus en plus complexe;
  • Les copropriétaires de plus en plus assertifs (et c’est un euphémisme);
  • Les horaires irréguliers des AG; le soir et souvent le week-end;​
  • Les nombreuses heures qu'un gestionnaire immobilier doit consacrer au suivi administratif et aux innombrables mails;
  • Et enfin, les faibles honoraires

Le syndic est une profession en pénurie, et ce depuis plusieurs années et cette tendance ne fait que s’amplifier...

Pourquoi les syndics n'augmentent-ils pas leurs tarifs?

Qu'est-ce qui empêche les syndics d'augmenter leurs tarifs? La réponse est triple.​

1. Les copropriétaires choisissent le syndic le moins cher

Tout d'abord, ce sont les copropriétaires qui décident qui deviendra le syndic de leur immeuble. Et l' UDS (Union des Syndics) le constate invariablement depuis belle lurette: les copropriétaires choisissent toujours le syndic le moins cher. Ils ne tiennent compte ni des qualités de services à fournir, ni des références ou des tâches que le gérant d'immeuble effectuera, mais fondent leur décision uniquement sur l’honoraire de base mensuel que le gérant d'immeuble indique dans son offre.

La plupart des copropriétaires pensent (à tort) que les devoirs du syndic sont de toute façon légalement déterminés… Ainsi, chaque gestionnaire immobilier effectuera les mêmes tâches, quels que soient ses honoraires. Nous conseillons aux copropriétaires d'être plus prudents! Il est très important, voire absolument nécessaire, de lire attentivement les offres de prix et de les comparer en détail.

2. Les syndics continuent de travailler à bas coût pour fidéliser l’ACP

Deuxièmement, il y a les concurrents: d'autres syndics qui ont également proposé un devis et aimeraient ajouter l'immeuble à leur portefeuille ... Une concurrence saine ne devrait pas être un problème. La loi sur la copropriété stipule également que des devis différents doivent toujours être disponibles.

Plus le besoin ou la motivation du syndic sera importante, plus ce syndic sera généralement disposé à perdre quelques euros après négociation avec le conseil de copropriété ou avec les copropriétaire. Il espérera ainsi compenser cette perte sur le long terme.

3. Travailler plus pour gagner moins: cette équation nous mène-t-elle à notre perte?

Rien n’est plus risqué et de fait, éloigné de la vérité ; car souvent il n'est pas question de long terme ... et les copropriétaires ou le conseil de copropriété exigent la signature d'un contrat annuel ...

L'année suivante, les copropriétaires ont changé d’état d’esprit et, pour toutes sortes de raisons, ont décidé de changer de syndic. Et ce syndic sera peut-être beaucoup moins cher ... Alors pour être sûr que les copropriétaires continueront à choisir leur cabinet, beaucoup de syndics continuent à travailler à bas coût ... Ce qui ne profite pas du tout à la profession et rend, par conséquent, le job moins attrayant pour les jeunes générations.

Tout le monde peut devenir syndic!​

L’Art. 577-4.§3 du Code Civil prévoit que « Toute clause limitant le droit du copropriétaire de confier la gestion de son lot à une personne de son choix, est considérée comme non écrite ». L'association des copropriétaires est donc totalement libre de choisir…. De plus, l'art. 5-§1 de la loi du 11 février 2013 stipule: Nul n'est autorisé à exercer en qualité d'agent immobilie /gérant (…) s'il n'est pas inscrit au registre des praticiens dans la colonne de la profession qu'il exerce.

Très souvent, ce gestionnaire immobilier est donc un gestionnaire immobilier agréé par l’IPI (Institut Professionnel des Agents Immobiliers). Mais le droit d'exercice n'est pas exclusivement réservé à cette profession.

L’Art. 5 §3 de la loi du 11 février 2013 prévoit des dérogations: Le Roi peut dispenser les membres des professions libérales des interdictions visées à l’alinéa §1 ... Dans ce cas, les Ordres et Instituts chargés de surveiller les activités de ces personnes consacreront dans leur déontologie une partie spécifique s’appliquant au contrôle des activités d’agent immobilier.

Concrètement, en plus du syndic professionnel, l’ACP peut également faire appel à un géomètre-expert, un avocat, un comptable agréé (fiscaliste), un architecte, ... ou un syndic bénévole. Ce syndic bénévole est l'un des copropriétaires de l’immeuble (non résident-locataire) qui agit donc comme gestionnaire d'immeuble, avec ou parfois sans connaissance de copropriété ...

Pour gérer son patrimoine il n’y a qu’une seule condition ; il doit être copropriétaire de l’immeuble. L'art. 5 §3 de la loi du 11 février 2013 stipule que : « les personnes qui ne gèrent que leurs biens familiaux ou dont ils sont copropriétaires ne sont pas soumises aux interdictions visées au §1 (l’agréation IPI)» .

Aucune connaissance du droit de la copropriété

Personne ne doute plus de la nécessité d'une formation spécifique approfondie pour un comptable, un fiscaliste, un géomètre ou un avocat. Pourtant, nous rencontrons beaucoup de copropriétaires/syndics bénévoles qui n'ont au départ aucune connaissance de la copropriété.

Ils s'aventurent dans un management dont la complexité juridique ne peut être sous-estimée et qui les dépassera tôt ou tard… sans oublier qu’ils portent seul et individuellement l’entière responsabilité de leur gestion (voir l’article 577-8-§5)

Par ailleurs, il est courant de constater l’émergence de certains conflits d'intérêts et/ou de disputes au sein des copropriétaires dans le cadre de la ventilation parfois subjective de certains frais (par exemple une ventilation par appartement et non par quotités arrive encore couramment) .

La déontologie de l'IPI ne s’applique pas à tous les syndics

Il est regrettable de constater, qu'à part dans le cas du syndic agrée et du géomètre expert, ni l'architecte, ni l'avocat, ni l'expert-fiscaliste ni le syndic bénévole ne sont soumis à la déontologie de l'IPI!

Un copropriétaire ne peut donc en aucun cas porter plainte auprès de l'IPI contre l'un de ces syndics ou contre ce syndic bénévole, dans le cadre des tâches qu'ils exercent en tant que gestionnaire immobilier. Il faut s’adresser aux ordres respectifs de ces gestionnaires, ce qui n’est pas logique.​

La gestion d’immeuble étant du ressort de l’IPI, ce dernier devrait être le seul juge en cas de violation des règles déontologiques, et le seul à pouvoir sanctionner les manquements de tous les syndics.

Rien ne garantit en effet, que les autres ordres respectifs porteront la même attention à une plainte concernant un tache très accessoire de leur profession.

Tarifs extrêmement bas

Ces professions assimilées peuvent donc légalement être désignée et agir en qualité de syndic d'une ACP. Ces catégories de syndics pratiquent à des tarifs extrêmement bas qui mettent parfois toute concurrence hors-jeu. Nous trouvons bien évidemment les frais les plus bas ou inexistants dans le cadre du syndic bénévole.

Prestations supplémentaires​

Bien entendu, le gestionnaire immobilier peut facturer des services supplémentaires (hors forfait) sur base d'un taux horaire ou d'un tarif par prestation. Mais cela reste très limité. Même avec ces frais supplémentaires, les syndics ne peuvent être sûrs de la rentabilité de leur bureau. Ce ne sont pas des revenus récurrents sur lesquels un gestionnaire immobilier pourrait compter pour recruter du personnel, par exemple.

Le « time registration », qu’utilisent les avocats, est loin d'être une pratique admise ou courante chez les syndics, car ils ont peur de perdre ainsi un immeuble… Finalement, cela signifie que les syndics effectuent la plupart des tâches supplémentaires gratuitement.

Conclusion

L’Union Des Syndics (UDS) travaille depuis longtemps à une approche plus stricte de la réglementation et du statut du syndic professionnel. Nous souhaitons réserver la profession de syndic aux syndics professionnels uniquement, sans syndics bénévoles et sans professions annexes diverses (avec tous le respect que nous leur devons, cela va de soi).

Ce n'est qu'ainsi que l'on pourra évoluer vers plus d’appréciation de notre métier, ce qui se traduira par de meilleurs honoraires et plus d'attractivité pour les jeunes syndics.


Professions annexes et ordres divers

Ci-dessous un aperçu de la déontologie concernant l'exercice de la tâche de gestionnaire immobilier.​

Déontologie de l’Expert géomètre
Art. 18. Les activités suivantes appartiennent à l'autorité de l'expert-géomètre: 3 ° exercer les activités réglementées d'agent immobilier, en application de l'article 4.1 ° de l'arrêté royal du 6
septembre 1993.

Déontologie de l’avocat

Art. 163 Les avocats peuvent agir en tant que syndic de l'association des copropriétaires dans le cadre des articles 577, 2-577, 14 DCC, conformément aux règles de dignité, de droiture et de discrétion qui sous-tendent leur profession.​

Déontologie du Comptable-fiscaliste

Art. 21. § § 2. Les activités professionnelles suivantes, exercées en tant que personne physique ou en tant que personne morale, sont toujours considérées comme des activités mettant en danger l'indépendance et l'impartialité du comptable externe BIBF: les activités de courtier ou d'agent d'assurances, avec le à l'exception de celles de courtier immobilier l'activité de gestionnaire immobilier, ainsi que toutes les activités de services bancaires et financiers pour lesquelles une inscription auprès de l'Autorité des services et marchés financiers est requise.

Déontologie de l'architecte

Art. 10 4 ° L'architecte peut également assumer la gestion immobilière et effectuer toutes les actions connexes; cependant, cette activité ne peut être exercée sous la forme d'une agence ou d'un bureau d'affaires.​


INFO

Mme Dominique Krickovic
Présidente UDS (Union des Syndics)
info@ufsyndics.be
www.ufsyndics.be

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